Habiter son corps

J’ai longuement hésité avant de répondre à mon tour à la question posée dans cet article : « Que vous évoque et que représente pour vous l'expression "habiter son corps" ?», et en écho à la jolie réponse de Victoire donnée Il s’agit d’un sujet sensible pour moi, l’un des plus délicats de tous peut-être, et les mots sont plus difficiles à trouver que d’habitude, ils me filent entre les doigts sans que je n’ai le temps de les saisir...et pourtant, j’aurais tant à dire, tant à crier sur ce sujet-là, tant de mots et de maux à vous raconter... Alors, je prends mon courage à deux mains, et je vais écrire, tenter de répondre au plus juste à cette question si personnelle, écrire sur ce sujet dont je ne parle jamais. Jamais, au grand jamais. Mon corps, je le cache, je me cache sous d’innombrables épaisseurs de vêtements, même en plein été je le camoufle, je me barricade contre le monde. Mon corps et moi, c’est un rapport conflictuel permanent, une guerre silencieuse et invisible, je crois la plus meurtrière de toutes. Je le maltraite et il me malmène, on est rarement d’accord tous les deux, il me joue de mauvais tours parfois mais je le comprends et le pardonne un peu car j’essaie si fort de le détruire. Il n’y a qu’avec lui que je suis aussi méchante, une vraie peste, toute la colère enfouie retournée contre moi-même. Il lutte pour rester en vie, pour me maintenir en vie. Et moi, je lutte pour le détruire.

Il y a cette personne, dans ma tête. Je crois qu’elle est celle que je suis vraiment. Et puis il y a ce corps, mon corps, mots si difficiles à prononcer, mon corps pourtant, l’expression au monde et aux autres de celle que je suis. Sommes-nous une seule et même personne ? Petit corps mal-aimé, fais-tu vraiment partie de moi ? Es-tu moi ? Etrangement, la première chose qui me vient à l’esprit quand je me demande ce que signifie pour moi l’expression Habiter son corps, c’est une citation lue un soir d’orage et dont je ne me souviens pas avec exactitude. Ce ne sont pas les mots de celui qui l'a écrit mais la signification y est je crois si je retranscris : « Notre corps n’est que le vaisseau, c’est notre Âme la passagère. » J’aime croire que notre corps n’a pas tant d’importance, même s’il domine chacune de mes pensées et que je le hais comme je n'ai jamais haï,  j’aime croire qu’un jour je ne le verrai que comme cela, mon vaisseau pour traverser la vie. Que j'apprendrai à l'aimer, à en prendre soin, à vivre sereinement avec lui et qu'on sera en harmonie, enfin, tous les deux.

 

Pour habiter son corps, je crois qu’il faut être en paix avec soi-même, avec celle que l’on est. Ne pas s’aimer par morceaux, ou au moins s’accepter pour de vrai, en grand, en entière. Pour l’instant, mon corps et moi, on cohabite. Parce qu’il a besoin de moi et que j’ai besoin de lui, et que malgré tout, nous n’avons pas le choix.
Pour moi, habiter son corps, c'est faire corps-à-corps avec lui, n'être qu'un, former un tout. En attendant, à tout tout petits pas, je ne forme qu'un tout tout petit rien. 

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Commentaires: 3
  • #1

    Caroline (samedi, 22 mars 2014 09:53)

    <3

  • #2

    Victor (samedi, 22 mars 2014 20:40)

    Grand texte, de l'introduction à la conclusion, rien à dire de plus.

    Courage.

  • #3

    Juliette (samedi, 22 mars 2014 22:50)

    C'est. Beau. Ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas vraiment si l'on peut dire que la lutte est belle, mais il parait que la vie est un voyage...