quand j'aurai oublié

Petit à petit je sens bien que je t’oublie. C’est insidieux, et même si je lutte de toutes mes forces pour chaque jour ramener à ma mémoire des bribes de toi, je ne peux que ralentir ce qui semble inévitable. L’oubli. Je veux dire, je n’oublie pas l’amour que je t’ai porté, non, je n’oublie pas comme je  t’ai aimée, mais j’oublie qui tu étais. J’oublie ta manière d’être, tes miaulements, ta démarche, tes habitudes. Je regarde les photographies mais ces instants figés ne me ramènent pas le souvenir de toi en mouvement. Les photographies ne ramènent pas la vie, elles n’en sont qu’une image. J’oublie à chaque seconde et je crois qu’oublier me peine autant que de ne pas t’avoir près de moi. Je pensais naïvement que lorsqu’on aimait si fort le souvenir de l’autre ne disparaissait jamais. Et pourtant. Est-ce qu’il va se passer la même chose avec V. ? Est-ce que je vais oublier la douceur de sa peau et le son de sa voix ? Est-ce que je vais oublier sa manière d’être avec moi, ses mots, ses gestes, l’intonation de son rire ? Tant pis si j’oublie son indifférence de la fin mais non, non, je ne veux pas oublier sa tendresse du début, je ne veux pas oublier le regard qu’il a posé sur moi ni cette manière si particulière qu’il avait de m’aimer. Je ne peux pas oublier que j’ai été aimée, vous comprenez, cela m’ensevelirai de chagrin. Je le sais désormais, les images ne peuvent pas remplacer les sensations qui, elles, finissent par disparaître, peu importe la grandeur de l’amour, peu importe l’intensité de la lumière de ce qui fut, le temps est sans pitié. Car si le temps apaise, le temps aussi saccage. Ce soir je pense aux souvenirs et à l’oubli de ces souvenirs, et comme cela me rend triste. 

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